samedi 25 avril 2009

Jusqu’à Khiva

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Pour rejoindre Khiva dans ce fertile delta du Kharezm isolé tout au Nord au milieu du désert, ce sont 480 km de route cahoteuse à travers les grands étendues du Kyzylkoum (le désert des «sables rouges»).

Une fois déjouée la première barrière des chauffeurs de taxi longue distance, intéressés donc mensongers, nous trouvons enfin un autobus, vieux et déglingué, plein à craquer, et à l’atmosphère déjà bien chargée après une nuit de route parcourue depuis la capitale Tashkent…
Tous nos camarades de voyage ont déjà eu amplement le temps de rompre la glace… il y a de l’ambiance là dedans!
Interpellations au chauffeur, bruyantes conversations d’un bout à l’autre du véhicule et plaisanteries qui fusent, éclats de rires généralisés… Les matrones des premiers rangs, avec une rudesse que l’on suppose très soviétique, ne se gênent pas pour venir à l’arrière réprimander les chenapans qui fument en cachette!…et, au passage, taper la discute (en affichant un beau ratelier en or clinquant) avec les deux frêles touristes que nous sommes, à grand renfort de gestes et de vagues traductions par celui qui connait quelques mots d’anglais 4 rangs derrière… Comme ça, tout le monde en profite!

Pause d’aisance très "panoramique" dans le désert

Les 6 heures de trajet, dans ce paysage plat et triste sous le ciel gris, passeront ainsi nettement plus vite.

En remontant si haut, nous nous rapprochons sérieusement de l’imprononçable région de Karakalpakie, et de sa Mer d’Aral, tristement célèbre avec cet assèchement qui repousse les eaux à des kilomètres (aujourd’hui plus de 150) de ce que fut le rivage il y a 50 ans, laissant sur son passage un gigantesque cimetière de ports et de bateaux rouillés sur le sable.

Nous ne pousserons pas jusque là bas (même si nous nous en approchons, il resterait encore beaucoup de kilomètres), mais nous en profitons pour nous pencher d’un peu plus près sur le sujet, jusque là à peine entrevu distraitement dans une spéciale de Thalassa ou sur le première page de Géo.

S’il faut attribuer ce drame de la Mer d’Aral aux politiques d’agriculture intensive de l’ère soviétique (monoculture du coton, programmes d’irrigation massive avec grands barrages, réduisant de manière dramatique les cours de l’Amou Daria et de la Syr Daria), nous apprenons, au cours de quelques rencontres Ouzbèkes, qu’il pourrait également exister une explication naturelle et cyclique : avec l’idée d’un potentiel équilibre entre la Mer Caspienne et le Mer d’Aral, fonctionnant comme en vases communicants via des voies souterraines.
Des textes du XIVème siècle feraient, parait-il, état d’un précédent assèchement identique à celui auquel on assiste aujourd’hui!
Un point de vue plutôt inédit, et très intéressant. On aurait bien envie de creuser plus.


Mais pour l’heure, nous ne monterons pas plus loin que la ville d’Ourgench, pour rejoindre sa voisine : la très particulière Khiva.

Particulière, déjà, parce que contrairement à la vivante Boukhara ancienne, le centre historique de Khiva est une ville musée, dont la vie ne s’anime que pour le tourisme, à l’abri dans sa coquille de remparts. Une coquille qui se vide presque entièrement une fois le soleil couché, un peu triste et sans âme…


Mais particulière aussi et surtout pour les trésors d’architecture inédits que l’on y trouve, datant curieusement, pour la plupart, du XIXème siècle, bien que l’histoire de la ville remonte nettement plus loin (la légende raconte qu’elle fut fondée par Sem, le fils de Noé).

Le plus marquant : le fameux minaret Kalta Minor, ambitieux projet, jamais finalisé, d’un minaret «si haut, qu’il aurait permis de voir jusqu’à Boukhara» (à 480 km!), nous laissant aujourd’hui en héritage ce large silo unique au monde, entièrement couvert de fines faïences aux mille motifs bleus et verts. On aime énormément.
Et puis, parmi cette forêt de madrasas, mosquées, palais et mausolées qui font la ville, on aime aussi tout particulièrement les minarets Juma et Islom-Hoja. Avec leurs simples anneaux colorés tranchant sur les teintes terre de leurs hautes tours, ils ressemblent plus à de hauts phares veillant sereinement sur les vastes étendues, d’autant plus sous ce ciel plombé couleur Bretagne!

Enfin, on appréciera énormément la beauté et la sérénité de la Mosquée Juma avec ses 218 colonnes de bois sculptés, qui lui confèrent cette atmosphère si chaleureuse, presque feutrée et ce doux parfum boisé…

A nos yeux, ces quelques trésors (et la beauté de l’ensemble de la vieille ville si bien conservée) justifient à eux seuls cette longue boucle de 1200 km à travers le Kyzilkoum avant de rejoindre Samarkand…

2 commentaires:

  1. Bon, ça traine là depuis le 25 avril... Heureusement qu'il y a un we de 3 jours pour vous laisser le temps de préparer un bilan toujours aussi top de vos dernières aventures !
    Biz

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  2. On aime beaucoup la photo de la pause pipi dans le desert. Est-ce que les femmes faisaient la pause de l'autre cote du bus ? Quand meme moins pratique, surtout en l'absence de tout buisson a l'horizon. Ou ont-elles eu a se retenir pendant les 480 km du voyage ?
    Bises,
    Diane et Sharon

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