Cette capitale, bordée de montagnes encore blanches et de champs de coquelicots, on ne la visite pas, on y vit plutôt... et cette vie a vite fait de remplir nos journées.
Il y a aussi tout simplement le quotidien... se nourrir, trouver une laverie, poster une lettre, communiquer, réparer son jeans... accumulation de petites choses, qui nous prennent ici des heures, dans une ville inconnue, où tout est bien loin d'être toujours à portée de main comme chez nous...
Enfin, il y a les rencontres, Kyrgyzes ou internationales... Andrea (Suisse) et Marketa (Tchèque) en mission pour MSF, Svetlana
Corruption sans limite, pauvreté, infrastructures en ruines, mésentente profonde entre les régions, trop isolées par les montagnes, d'une république arbitrairement créée sous l'ère soviétique, sur un territoire loin d'englober tous les Kyrgyzes (peuple nomade alors sans aucune frontière) et comptant une grande partie d'Ouzbèkes, qui ne se reconnaissent aucunement dans cette identité nationale imposée.
En 1991, c'est une indépendance pas particulièrement souhaitée, qui leur tombe dessus.
Sortie, en un claquement de doigts, du giron soviétique... Tout est a créer/re-créer... gouvernement, institutions, monnaie, approvisionnement, relations commerciales, système pénal, etc...
Le nouveau pays s'organise, bien vite dirigé par l'élite sociale historique du peuple Kyrgyze : les descendants de "la première Babushka" - 1ere épouse d'un lointain souverain - , les descendants des épouses suivantes n'étant que leurs subordonnés... Presque un système de castes qui semble perdurer encore fortement dans les comportements.
Au sein de cette élite, chacun des présidents en place (deux jusqu'ici) installera l'ensemble de ses proches aux postes-clé du pouvoir... Peu importe le mérite, seule compte l'appartenance au bon clan... ou, bien entendu, le petit billet vert (plutôt gros de préférence) placé au bon moment, à la bonne personne...
Ainsi le Kyrgyzstan, en quelques années, est devenu un favori dans le top 20 des pays les plus corrompus.
Un système qui ne profite, bien sûr, qu'à l'infime partie aisée de la population.
Pendant que le pouvoir s'engraisse, à tous les échelons, le pays s'asphyxie et s'effondre lentement.
Les médecins reçoivent un salaire de misère (~35USD / mois), le
Dans les villages, ou aux abords des villes, les classes les plus modestes cultivent le moindre lopin de terre pour améliorer leur quotidien. Pour eux, c'est sûr, c'était mieux avant... "avec les Russes, ils avaient tout!... Éducation, santé, nourriture en quantité suffisante, gaz, électricité, etc...et libre circulation dans tous les états de l'union"
Quant aux productions locales, le gouvernement préfère les réserver prioritairement a l'export, autrement plus lucratif, laissant par exemple les habitants très régulièrement (quotidiennement?) privés d'électricité (sauf peut être en ce moment, à 2 mois des élections présidentielles).
Trace de la regrettée période russe : cette sorte de service civique, dès les premiers samedis du printemps, où tous les habitants, plus particulièrement les lycéens et étudiants, s'affairent ensemble dans les rues, nettoyant et entretenant trottoirs et espaces verts... et c'est vrai qu'ils sont particulièrement propres et agréables!
Joli petit reste de cet idéal initial d'égalité et d'implication de chacun pour les bien être de tous...
La tête pleine de tout cet envers du décor, nous reprenons la route, vers le Sud, traversant cette fameuse barrière de montagnes qui sépare trop les régions, regardants nos camarades de voyage un peu différemment, avec cette impression de les connaître un tout petit peu mieux...
A Arslanbob, accueillant petit village de montagne très traditionnel où nous ferons étape le temps d'une belle ballade et deux nuits, nous verrons les petits lopins de terre cultivés partout pour subsister, nous entendrons le "c'était mieux avec les Russes" de la bouche de Nisom, qui nous guide à travers l'immense et rafraîchissante forêt de noyers, qui fait la renommée de cette jolie vallée escarpée.

Ici, tout le monde travaille aux champs ou dans les arbres. Et les enfants, vraiment débrouillards très jeunes ici, manquent souvent, pour aider la famille, plusieurs mois de cette école qui leur semble offrir si peu de débouchés...
De notre côté, nous retrouvons, à nouveau loin de la ville, entassés pendant nos longues heures de trajet ou chez nos hôtes adorables à Arslanbob, l'immense barrière que représente notre ignorance de la langue Russe (notre anglais ne suffit pas ici).
Il faut alors plutôt laisser faire le temps ou les circonstances, qui permettront un sourire, une attention, un petit coup de main, ou un jeu avec les enfants (merci les marionnettes à doigts IKEA!)...
Et bientôt, tous nous prennent sous leur aile... Sans s'en rendre compte, on échange, on ne sait comment, une quantité incroyable d'informations sur ce que nous sommes, sur nos vies... et l'on regrette bientôt de devoir se dire au-revoir si vite, repartant parfois avec un cadeau, et toujours, avec des sourires francs et éclatants qui font chaud au coeur.

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