samedi 20 juin 2009

45 degrés sur la plaine Pakistanaise…

Une fois redescendus des frais alpages et des neiges éternelles, nous avons bien du mal, reculant l'échéance, à quitter notre douce retraite de Vallée de Hunza pour se remettre en route vers le Sud.

Un premier petit trajet de 5h, histoire de se mettre en jambe, pour rejoindre Gilgit et son ancestral pont suspendu…


Puis, dans la foulée, le vrai trajet... Celui de 22 heures de bus -et 2 crevaisons- pour parcourir les 500 derniers kilomètres de la Karakorum Highway serpentant le long de l'Indus (de plus en plus puissant), et rejoindre Islamabad dans la plaine.


Il faut bien avouer qu'au bout de tant d'heures de voyage, secoués jusqu'au bout, le paysage de la mythique route ne nous impressionne plus autant… Ce qui ne nous empêche pas, néanmoins, de continuer à lorgner par la fenêtre, toujours à l'affût des «camions - fête foraine» de plus en plus nombreux, et ravis de découvrir nos premières réelles villes/bourgades pakistanaises, leur faune, leurs couleurs, leur allure… certainement plus caractéristiques du pays en général, que les quelques paisibles villages de montagne rencontrés jusque là.


Trafic, poussière, deux-roues, klaxons, camions de poules, rickshaws, boui-bouis noirs de suie fleurant bon la vieille friture, caniveaux douteux et «parfumés», échoppes de bric et de broc débordant sur la route, montreur de pélican (!!), ligne interminable de vendeurs de ventilos… on a déjà l'impression de toucher un peu l'Inde du doigt, certainement en moins coloré (moindre usage de couleurs flashi, et surtout, moins de femmes dans les rues ici).


Apercevons également nos premiers policiers, militaires et barrages… La vie ne semble pas tout à fait la même par ici.


Enfin arrivés à Islamabad, ou plutôt d'abord à Rawalpindi, la ville dite «jumelle»… En réalité, Islamabad et «Pindi» ne sont pas plus jumelles que ne pourraient l'être un phacochère et un poisson rouge… Voisines directes, oui, et avec un vrai point commun: une température ambiante de 45°, qui semble brûler tout et tout le monde.

Nous n'en souffrirons pas encore trop ici, rapidement accueillis par Shanewas, ce jeune pakistanais qui nous avait si gentiment conduits jusqu'à Karimabad après avoir passé la frontière chinoise avec nous.

Avec lui, nous n'apercevrons que très peu de la bourdonnante Rawalpindi. Il préfère, avec fierté, nous montrer Islamabad, la «jeune» capitale du haut de ses 40 et quelques années… Ses longues et vertes avenues rectilignes, contrôlées à chaque carrefour par des militaires aux aguets, ses ambassades, ses bâtiments du gouvernement, ses malls modernes et huppés, sa presque futuriste Faisal Mosque, son grand parc central tout propret… Ses villes nouvelles satellites, quartiers dorés surprotégés, où les plus riches vivent dans le plus grand confort et la plus grande tranquillité… et où Shanewas rêve de s'installer bientôt…
Une véritable bulle complètement déconnectée du pays… Intéressant, et déconcertant à la fois, lorsque notre jeune ami nous explique, avec un enthousiasme débordant, «qu'ici, quand on a des relations et de l'argent, on peut vraiment tout faire, tout se permettre, contourner toutes les règles, et surtout passer devant les autres… et que c'est ça qui est génial au Pakistan; il en profite à max».
Gloups… si toutes les riches familles au pouvoir sont sur le même mode, quel avenir pour le pays?
Jinnah, le père fondateur du Pakistan, doit se retourner dans sa tombe, à la recherche des belles valeurs brandies jadis… Faith, Unity and Dicipline.

Shanewas, nous présente aussi quelques uns de ses collègues «businessman», bien sympas, et, semble-t-il, un peu plus mesurés (peut-être un peu plus âgés?), avec qui nous partageons une amusante soirée balade et bowling au parc.

Et surtout, il nous présente sa famille, d'origine Pachtoune, formidablement accueillante (au point qu'ils auront même du mal à nous laisser repartir), qui nous ouvrira généreusement sa table, sa maison, et, Ô joie, son unique chambre climatisée!


2 jours à nous faire gâter, abreuver de çays et gaver de mangues juteuses ou de beignets bien gras, par sa maman Shah Jahan, qui nous couve comme ses propres poussins, nous embrasse comme du bon pain, nous sort les albums photos, et surtout tous les interminables DVD des mariages de la famille (filmés en plan fixe pendant des heures…).

2 jours un peu hors du temps, à papoter longuement, dans le bruit assourdissant des ventilos…

Avec la pétillante Zereen (sœur de Shanewas) et son amusant petit bout-d'chou Mussa, se préparant à l'arrivée du deuxième dans les tout prochains jours…

Avec le très dynamique Farukh (son mari) qui, travaillant pour une ONG très active ici (Catholic Relief Services), nous en apprend énormément sur la situation actuelle du pays :
- Sur le sort des habitants de la Vallée du Swat qui fuient la zone,
- Sur l'année 2008, d'après lui, beaucoup plus «rocking» (en termes de menaces terroristes) que cette année 2009 jugée ici plus sous-contrôle,
- Ou encore sur cette inconfortable position sandwich entre l'Inde, l'Iran, l'Afghanistan… qui met depuis toujours le pays en plein cœur des enjeux et des conflits des puissances étrangères. Selon lui, le même Pakistan, placé n'importe où ailleurs sur le globe, serait le plus beau pays du monde!

Des adieux chaleureux, et des promesses de revenir un jour, Inch' Allah!
Puis, quelques heures de bus supplémentaires, pour rejoindre la très historique Lahore…


Là, changement de décor complet, en atterrissant dans la fournaise du Regale Internet Inn, le repaire de backpackers de la ville. Vieil immeuble de briques dans un quartier populaire, boxes surchauffés sous les toits, vagues ventilos aux allures de moulins de Don Quichotte, tant l'air brûlant qu'ils brassent reste sans effet (on se demande même s'ils ne viennent pas sournoisement nous réchauffer!)… Conversations à 2 de tension sous le micro haut-vent du toit terrasse où tous les pensionnaires se retrouvent immanquablement, en quête du moindre brin d'air.
Activités favorites :
- les douches!… même si l'eau n'est jamais vraiment froide, même si la salle de bain commune est sordide… simplement pour la très éphémère illusion de froid qui vous saisit lorsque vous en ressortez sans vous être séché… L'extase!
- la lessive à la main… que l'on a jamais été aussi heureux de faire, pour le seul plaisir de patouiller dans la flotte.


Courageusement, nous nous extirpons de cette langueur pour aller découvrir la ville - tant qu'à crever de chaleur même à l'abri sans rien faire, autant sortir et faire quelque chose!


Parcourons à pied le labyrinthe des ruelles de la vieille ville, surchargées et cradingues, mais Ô combien animées, colorées, joyeuses et accueillantes!… pour aller déjeuner sur la terrasse d'un somptueux Havilis (ces anciennes demeures traditionnelles des riches marchands Indiens et Pakistanais) surplombant la majestueuse mosquée Badshahi, avant de visiter l'imposant fort Moghol Shahi Quila.


Ainsi se conclura, chaudement et «historiquement», notre découverte d'un Pakistan superbe et formidablement accueillant et convivial, qui nous a semblé, pour la partie que nous en avons visitée, plus souffrir de cette image internationale ternie que de la réalité des conflits régionaux qui agitent certaines zones frontalières.

3 commentaires:

  1. SUPER ton carnet de Voyage, j'adoooore (j'ai mis un lien ami sur mon blog, dis moi si ça te gêne ?) Amitié Chantal

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  2. Bonjour, je suis moi meme d'origine pakistanaise vivant en france mais je retourne au pakistan chaque année et je trouve vos description PARFAITE , parce qu'a ecouter les medias on croiserait des terroristes a tout les coins de rue qu'il n'y aurait que la misere !.En tout cas sa m'a rapelé des souvenir votre carnet ! :-)

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  3. Moi aussi je suis d'origine pakistanaise Et j'aimerais te dire Merci pour avoir publié cet article en parlant autrement du pakistant qu'un pays dangereux et terroriste ! :)

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